À l’occasion de la Paris Design Week, la galerie nomade Maison Parisienne et Aymeric Peniguet de Stoutz ont invité Aude Franjou à réaliser une œuvre textile monumentale au cœur de la colonne de Juillet, place de la Bastille à Paris.

Inspirée par les recherches du biologiste et penseur Ernst Haeckel dont elle étudie les planches illustrées depuis de nombreuses années et qui révèlent au xixe siècle un monde invisible à l’œil nu, Aude Franjou se lance à l’assaut de la colonne et sculpte des dizaines de mètres de lin. Elle renferme dans son cabinet de curiosités personnel nombre de coraux et gorgones. Ils prennent place dans son atelier aux côtés des racines et des écorces, s’hybrident les uns aux autres pour dessiner dans l’esprit de la créatrice un monde à part, un monde où la vie, dans ses moindres méandres, se veut des plus précieuses.
La majorité des coraux vit en symbiose avec des algues microscopiques appelées zooxanthelles. Celles-ci leur fournissent l’essentiel de leur énergie grâce à la photosynthèse. En contrepartie, les coraux les protègent au sein de leurs structures. Aude Franjou joue de cette double relation entre les coraux et les algues pour en créer une nouvelle entre la structure de la colonne et ses propres coraux. En prenant appui sur l’ossature de métal qui construit le monument elle développe un nouveau rapport de matière, qui de l’eau du Canal Saint-martin s’élance jusqu’au ciel de Paris.
Les lianes, installées près des caveaux, apparaissent au visiteur dans des dégradés de blancs symboles de l’ostéoporose et de la mort du corail. Puis ivoire et grège, ils gravissent la pierre des premiers escaliers. Progressivement, ils reprennent vie par la couleur et c’est bientôt un tourbillon de teintes vives et toniques, une gamme chaude et flamboyante qui s’empare de l’espace dans une succession de jaune tournesol de rose corail, de rose Flamingo, de rouge Scarlett, de cherry flame et de vermillon. La longue et fantastique ascension s’achève dans un carmin intense et vibrant. Synonyme de renaissance, sa gamme chromatique, chaleureuse et tonique, se déclinant du blanc au rouge, célèbre tout autant l’énergie du mouvement, que la joie d’être vivant.

Du pied de la colonne, quand le regard s’élève vers le Génie de la Liberté, on voit se déployer l’escalier telle une parfaite ammonite envahie de coraux, symbole du perpétuel tourbillon de la vie. On y lit toutes les sources d’inspiration d’Aude Franjou, de la science du vivant aux mathématiques, du nombre d’or à la croissance en mode fractale. On y lit les ridules de sable ou le dessin d’une cellule de Purkinje. On y lit l’existence de toutes les connexions visibles et invisibles entre des mondes a priori lointains mais ici réunis au cœur du monument.
Symbole de liberté, les coraux de la sculpteure invitent le visiteur à conscientiser la fragilité du vivant offrant une forme d’espoir en sa résilience. Les coraux d’Aude Franjou deviennent dans leur élévation un lien puissant vers un monde de vie et de liberté, un monde joie.